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19 mai au 21 juin 2012 - CORDES SUR CIEL (81)

Musée d'art moderne et contemporain

Exposition individuelle. 28 vues

© Crédits photos : E. Debuire Baratz,V. Grillet Baratz,  V. Landais,  F. Monsérat

Propos sur la peinture d’Annie Baratz

Je rentre à l'instant de Cordes où en fin de matinée, il tombait vraiment des cordes, au point que  la citadelle avait quasiment disparu dans les nuages. J'ai vu l'exposition d'Annie Baratz, ses tableaux dans ce lieu magnifique où la matière, la pâte picturale dialoguent avec les murs de la salle. Il faut prendre le temps de regarder, de se laisser guider par les traces savamment disposées comme des sillons dans la terre et jeter de temps à autre un œil furtif vers l'extérieur, en direction des paysages alentours que l'on voit par les fenêtres, puis revenir, s'enfoncer à nouveau dans l'épaisseur du visible et " voir " ou plutôt " entrevoir " ce lien impalpable, ténu, fugace qui joue à la surface de ses " paysages avec figures absentes ". J'insiste vraiment sur ce rapport qui m'est apparu comme une évidence entre sa peinture et la terre paysage, comme si les deux entités séparées et factices  ne faisaient plus qu'une pour faire sens dans le silence.

En fait de paysage, c'est aussi la question de l'espace qui est posée, là devant nous ou derrière, caché dans la matière qui parcourt ta peinture, qui la traverse de part en part et lui donne naissance. Nous assistons à l'irruption d'un espace paysage partiellement dissimulé, recouvert par les plis de la terre matricielle et laissant jaillir comme par effraction des évocations de figures, nous rappelant par là un monde originel, dont nous aurions oublié l'évidence dans sa manifestation première.
Il ne s'agit pas là d'un espace mathématique, quadrillé, neutralisé, géométrisé et perspectif mais d'un espace sensible. Cet espace a quelque chose à voir avec ce qu'Aristote appelle aussi " lieu " ou " topoï " et qui semble à la fois se distinguer de ce concept d'espace tout en y étant relié, associé, intégré en une multitude de lieux entrelacés et cachés. Cet entrelacement de lieux constitue l'invisible de ta peinture et en même temps en structure discrètement l'espace qui se donne à voir, un peu comme une offrande. On est alors " dans ces parages du vague en quoi toute réalité se dissout "(Mallarmé - Le Coup de Dés).

Ce rapport à l'espace, considéré comme " sensible ", relève du " vécu " et s'oppose pleinement à toute la tradition classique qui maintenait une distance entre le tableau et le monde à la manière du géomètre parcourant l'espace mesuré, et ré-invente par là d'une manière singulière, un autre rapport au monde, à la peinture en brisant cette " mise à distance ", pour se fondre et disparaître dans l'épaisseur du visible évoqué plus haut dans le texte. Si cette " mise à distance " n'est plus effective et n'entre plus dans la constitution du tableau, alors s'opère un renversement significatif, dont la mise en œuvre est déjà perceptible dans la peinture de Cézanne, engendrant ainsi une " césure " fondatrice dans l'acte de création où l'apparente non-maîtrise du geste fonde une pensée nouvelle de l'art. Cette multiplicité de lieux est en quelque sorte ce qui fonde l'espace et non l'inverse, autrement dit l'espace n'est pas donné mais s'invente au fur et à mesure dans le parcours qu'effectue le regard et que ta peinture rend possible.


Patrick Bilheran, peintre